Le Maâlem de la Zaouïa de Sidna Bilal se contentait de vivre de son hajhouj, de ses «lilas» et de la «ziara»
Maâlem de la Zaouïa de Sidna Bilal et maître incontesté de son moussem annuel, Abdellah Guinia s’est éteint jeudi dernier au service de réanimation au Centre hospitalier Sidi Mohammed Ben Abdellah d’Essaouira où il a été admis pour insuffisance rénale et œdème aigu au niveau des poumons. Moins médiatisé que son frère Mahmoud, Maâlem Abdellah se contentait de vivre de son hajhouj, de ses « lilas » et de la portion congrue que lui laissaient les “ziara”.
Avec lui, les « Jdaba» se sentaient entre de bonnes mains, lui qui avait, durant de longues années, donné vie, couleur et rythmes à la musique gnaouie.
A l’instar de plusieurs figures emblématiques de celle-ci, il est mort dans le plus total des dénuements.
Son décès nous interpelle tous et, particulièrement, ceux qui font commerce de cette belle musique de transes ou qui ont bâti leur fortune sur ses mélopées pentatoniques.
Un autre Maâlem gnaoui s’est éteint jeudi 21 mars 2013 au service de réanimation au Centre hospitalier Sidi Mohammed Ben Abdellah à Essaouira.
Hospitalisé depuis une semaine, Maâlem Abdellah souffrait d’une insuffisance rénale et d’un œdème aigu.
C’était un grand et si discret Maâlem gnaoui, autant maître de son art que son frère Mahmoud. Maalem Abdellah modeste, se contentait vivre de son hajhouj, de ses nuits de transe et d’exaltation, et du strict minimum qui lui restait après la répartition équitable de la «Ziara» sur l’ensemble des membres de son groupe.
Maâlem Abdellah était le Maâlem de la Zaouïa de Sidna Bilal, et le maître incontesté de son moussem annuel. Il a côtoyé l’ex-mkadma Boukouli ainsi que sa fille Latifa Essaguer.
«Maâlem Abdellah Guinia était membre de l’Association Dar Lagnaoui pendant huit ans. Il était aussi le seul Maâlem de la Zaouïa et du moussem. C’était un homme discret, modeste et très aimé de ses collègues et admirateurs», nous a déclaré Abderrahman Naciri président de l’Association Dar Legnaoui qui a redonné vie au bâtiment menaçant ruine de la Zaouia de Sidna Bilal.
Moins médiatisé que son frère Mahmoud, Maâlem Abdellah a fait les frais de sa discrétion et sa modestie. Il évitait toujours les feux de la rampe et laissait les autres parler de lui. Peu nombreux sont les Souiris qui connaissaient les vraies compétences musicales de feu Abdellah. Avec lui, les «Jdaba» se sentaient entre de bonnes mains. Il avait, de longues années durant, donné vie, couleurs et rythmes aux « lilas » au sein de la Zaouïa de Sidna Bilal.
Malheureusement, et à l’instar de plusieurs Maâlems et figures emblématiques de la culture gnaouie, Maâlem Abdellah est mort dans la misère.
Né en 1956, il était père de cinq filles dont une mariée à un Maâlem gnaoui. C’est l’un des fidèles du monde gnaoui sans ressource financière. Son cas remet encore une fois en question l’approche adoptée à l’égard du patrimoine gnaoui qui doit son existence et sa pérennité à ce genre de dévots qui n’ont aucune notion du marketing et des affaires…
Le cas de feu Abdellah interpelle tous ceux qui ont fait commerce de la «tagnaouite» afin que son héritage artistique soit honoré et que la dignité de sa famille et des grands Maâlems encore en vie soit préservée.
La fin d’une légende de la tagnaouite
Descendant d’une brillante lignée de Maâlems, feu Abdellah Guinea fut fatalement nourri de « tagnaouite ».
A 12 ans, il accompagnait son père, Boubker, dans les cérémonies nocturnes, où il révélait des dons prodigieux, qu’il affinait au contact de maîtres. A 16 ans, il a été sacré Maâlem.
Il découvrit, par la suite, le reggae, s’en est épris et crée un groupe qui reprend les chansons de Nass El Ghiwane et de Lemchaheb.
Sa curiosité pour les musiques aux couleurs humanistes et révolutionnaires ne s’est jamais émoussée, mais c’est à la musique gnaouie qu’il s’est toujours voué corps et âme.
Lundi 25 Mars 2013
Abdelali Khallad
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Maâlem Abdellah Guinia s’éteint dans la misère
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