Tagnawittude – Film documentaire

Date de sortie 6 juin 2012 (1h20min)
Réalisé par Rahma Benhamou-El Madani

TAGNAWITTUDE de Rahma Benhamou El MadaniOlivier Barlet
Rahma Benhamou El Madani raconte en début de film sa rencontre avec la musique de Gnawa Diffusion. Amazigh Kateb, fils de Kateb Yacine, compositeur et chanteur du groupe, en souligne la proximité avec le reggae et le flou de l’identité africaine de l’Afrique du Nord, que nous avions documenté dans le dossier du numéro 13 d’Africultures : Africanité du Maghreb. Chanteur algérien, Amazigh Kateb s’est intéressé à cette musique, profitant de cette ouverture d’un musicien gnawa qui dit qu’il suffit de jouer du guembri pour faire partie de la communauté ! Il mêle aux éléments musicaux et textuels les ingrédients d’autres influences pour bâtir ce qui fait le succès de Gnawa Diffusion : l’association d’une musique et d’un combat, dans un lien charnel, à l’image du lien des musiques gnawa avec leur fond traditionnel populaire, loin des pâles imitations que l’on rencontre ici ou là. La réalisatrice fait fi de toute introduction explicative, préférant évoquer ses souvenirs familiaux et laisser le spectateur entrer peu à peu dans la dynamique d’une musique et de musiciens au carrefour des cultures.
Le fait d’y entrer par le biais de son retravail en France par un musicien algérien lui permet de rompre avec la démarche ethnologique qui sous-tend nombre de films sur les Gnawas, leur musique, leur communauté et leurs rituels. Ces rituels, importés par les esclaves noirs au Maghreb (derdéba au Maroc, diwan en Algérie, stambali en Tunisie) font écho aux transes de possession du ndoep sénégalais ou du vaudou yoruba qui ont également essaimé dans le vaudou haïtien et le candomble afro-brésilien. Ils permettent de soigner ceux dont, comme dans le ndoep sénégalais, « un esprit est trop amoureux », raison pour laquelle ils manifestent des troubles : il s’agira alors de nommer cet esprit au cours d’une nuit de transe pour finalement l’apprivoiser en lui servant sur la durée à boire et à manger sur un hôtel dédié.
Introduite dans sa contemporanéité par Amazigh Yacine et son groupe, la démarche musicale et mystique gnawa peut alors être présentée par les témoignages des maalems (prêtres gnawas), notamment au festival d’Essaouira où tous se regroupent. Ici encore, ce n’est pas une approche scientifique mais une captation de paroles et de moments de rituels et de transes, car il ne s’agit pas pour la réalisatrice de comprendre mais de sentir, voire de ressentir à nouveau cette fascination éprouvée dans son enfance lors des rituels de sa mère. Cela fait-il un film, malgré la faiblesse des moyens et les défauts d’éclairage dans des lieux très fermés et dans le respect des rituels ? Pourquoi pas, si l’on n’attend pas de tout comprendre et de tout savoir, mais qu’on est tenté par la plongée dans ces pratiques ancrées dans des cultures noires qui puisent dans leur vécu l’énergie de se faire passeurs, vecteurs de valeurs, de sens, de sacré. Non pour proposer une nouvelle religion ou une nouvelle croisade mais pour que ceux qui se sentent en déphasage avec l’ordre établi, et développent de ce fait des révoltes ou des troubles, trouvent dans ces rituels la possibilité de le crier. L’objectif n’est pas d’éliminer le trouble mais de vivre avec, de s’en servir, de le gérer. L’enjeu de ces rituels est dès lors une subversion du lien social par la mobilisation d’une force créatrice originale, forcément dérangeante, à l’image de ce film inclassable mais bourré d’empathie.
– See more at: http://www.africultures.com/php/?nav=article&no=10789#sthash.WRDMdQfL.dpuf
– Acheter le DVD http://www.filmsdocumentaires.com/films/3218-tagnawittude
– Suivre sur facebook https://www.facebook.com/pages/Tagnawittude/147241015718

GB Tagnawittude par GALAXIE-BERBERE

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