Yahia BOUNOUAR. Directeur du site Radio Kalima Pour le pouvoir, l’information n’est qu’un outil de propagande

Après avoir dénoncé la semaine dernière « l’interruption arbitraire de transmission satellitaire », Radio Kalima est toujours en ligne. Les explications de son directeur.
● Vous avez déclaré que Radio Kalima était censurée. Comment en êtes-vous arrivé à cette conclusion ?
Le mardi 16, des internautes en Algérie nous ont contactés pour nous dire qu’ils n’arrivaient pas à se connecter. On a pensé à un problème technique. Nous avons vérifié
mais il n’y en avait aucun. Pendant ce temps, les lecteurs, de plus en plus nombreux, continuaient à nous contacter. Alors, nous avons trouvé la solution du proxy, un site hébergeur qui permettait indirectement d’accéder au site. Le lendemain vers midi, les filtres étaient installés à peu près partout, l’accès était bloqué dans tout le pays. Pour ce qui est du satellite, notre provider nous a informés. La société Eutelsat (propriétaire de Hotbird) avait bloqué la diffusion.
● Quelle est, selon vous, la raison de cette censure ?
Il y a d’abord l’idée que se fait le pouvoir algérien de l’information. Pour lui, l’information n’est pas au service du citoyen, de son épanouissement. Elle n’est qu’un
outil de propagande. Le pouvoir ne supporte pas l’idée que les citoyens puissent accéder à des informations qu’il ne contrôle pas. Une réaction typique des régimes autoritaires qui craignent leur peuple. Ils ne peuvent pas transformer l’Algérie en un énorme bunker ou rien n’entrerait. A l’heure d’Internet, c’est impossible.
● Mais beaucoup reçoivent encore Kalima, comment expliquez-vous cela ?
Beaucoup de gens ne peuvent y accéder et utilisent des proxys. On a remarqué qu’un très petit nombre arrivait encore à se connecter directement. Nous n’avons pas d’explication. Peut-être qu’ils ne maîtrisent pas encore les équipements ou que les filtres n’ont pas été mis partout.
● Le soutien des Algériens sur le net vous a-t-il touché ?
Oui, c’est la preuve que les Algériens comme les autres, notamment les jeunes, se sont appropriés cet outil. C’est un espace de liberté et ils ne comprennent pas que l’on
veuille leur interdire ce qu’ils ont envie de lire, d’écouter, de regarder. Au-delà du cas de Radio Kalima, cette logique de censure, d’enfermement est insupportable. Si on
accepte que le pouvoir verrouille également Internet, ce qui semble très difficile à faire, alors on accepte de lui reconnaître d’être en quelque sorte notre propre conscience.
● Beaucoup pensent que ce n’est qu’un coup de pub pour votre site. Que répondez-vous ?
J’ai entendu parler de ces rumeurs, colportées par des auxiliaires des services de renseignements. Benchicou se serait censuré lui-même, l’auteur de Poutakhine également, le site rachad.org aussi. C’est un procédé minable de basse police, aussi minable que le régime qui gouverne l’Algérie. Ils ne sont même pas capables d’assumer leurs décisions. A les entendre, j’aurai demandé au DG d’Eutelsat de couper la liaison satellitaire pour me faire de la pub. Et bien sûr, ce charmant
monsieur aurait accepté. Loufoque ! Cette mesure idiote ternit l’image de l’Algérie. ■
El Watan Week End – 26 03 2010

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